OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 L’enfer du lol http://owni.fr/2012/11/12/l-enfer-du-lol/ http://owni.fr/2012/11/12/l-enfer-du-lol/#comments Mon, 12 Nov 2012 10:06:06 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=125680

“- L’album de Charlotte Gainsbourg est la grâce quintessenciée – Je suis tellement d’accord avec toi !” Ah ils sont nombreux ces moments gênants sur Internet ! Ces discussions qui dérapent malgré nous pour cause de sarcasme trop crédible ou à l’inverse pas assez grossier pour être détecté.

En ligne, personne ne vous entend rire. Ou ne voit la malice scintiller au fond de vos yeux au moment de balancer une vanne pincée. Résultat : Internet est une grosse mare dans laquelle les quiproquos s’enfoncent comme de gros pavés.

Au-delà des petits ajustement relationnels imposés par le sarcasme incompris (“hihi, mais je plaisantais pour Charlotte, mais les goûts, les couleurs ;D”), ce dernier pose des problèmes autrement plus conséquents. Notamment auprès de la communauté des linguistes, experts en informatique et autre spécialistes désireux de déchiffrer tous nos messages laissés sur Facebook et Twitter – pour ne citer que les gros.

C’est la “science étrange de la traduction du sarcasme en ligne” écrit le Wall Street Journal dans un article paru fin octobre.

Par définition, ce genre de plaisanterie dit “le contraire de ce qu’on veut vraiment dire”, poursuit la journaliste. Le sarcasme s’avère donc “être un obstacle pour les chercheurs et les spécialistes en marketing qui créent des programmes informatiques pour analyser les importantes réserves de bavardages en ligne pour mesurer l’opinion publique sur des produits ou des politiciens.”

L’humour en ligne comme pare-feu aux dernières trouvailles du marketing “digital”. Comme antidote à la récolte des données que l’on laisse sur les services a priori gratuits du web. Qui s’en servent en retour comme potentielle machine à cash. Troll ultime : 4chan n’aurait pas fait mieux.

Alors bien sûr, des stratégies existent pour déceler la malice. En particulier les smileys, ou émoticônes, ces petits visages de travers, avec ou sans nez, si pratiques pour se rendre clairs. Ou désamorcer une situation embarrassante (cf. supra).

Mais le smiley ne suffit pas. Kate Paulin, responsable dans une agence marketing et interrogé par le WSJ, est formelle. “Travailler pour des marques telles que Coca-Cola lui a appris qu’il ne faut pas se fier aux apparences d’un smiley”, détaille le journal. Qui ajoute :

Ados et twittos utilisent des émoticônes de manière sarcastique, à l’en croire. Et un simple point d’exclamation – contrairement à plusieurs – peut en fait traduire un manque d’enthousiasme.

Les ravages de l’humour en ligne sont plus grands encore. Ils se constatent jusque dans les labo de recherche, où l’on s’arrache les cheveux à systématiser la compréhension des double, triple sens des tweets et posts. “Le sarcasme est l’un des problèmes les plus difficiles en informatique”, confie ainsi un professeur d’une université californienne, qui conduit un programme d’analyse des “sentiments” exprimés sur les réseaux sociaux. Ce qui fait dire au Wall Street Journal :

Les programmes informatiques suivent des règles strictes, alors que le langage naturel, en particulier la culture ‘private joke’ du web, non.

Mais les casse-têtes des uns font le bonheur des autres. Ou presque. Pour certains, comme Doug Sak, cette absence de signalétique sarcastique est une mine d’or. Il y a 10 ans, il a créé “SarcMark”, une sorte de spirale avec un point au milieu, qu’il souhaite imposer comme marqueur universel du sarcasme. A en croire le Wall Street Journal, il aurait même contacté plusieurs opérateurs pour imposer son sigle dans les claviers des téléphones.

Contacté par Owni pour en savoir plus, Doug Sak ne nous a toujours pas répondu. Il semblerait néanmoins que le succès se fasse attendre. Mais l’homme d’affaire garde espoir. Et son sens de l’humour : “je ne sauve pas le monde mais cela a un véritable intérêt”. Du sarcasme, évidemment.



Et pour toujours plus de sarcasmes, allez lire les commentaires (en anglais) de l’article original !

Photo par Djniks [CC-byncsa]

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Clic, clic, fric http://owni.fr/2012/11/08/clic-clic-fric/ http://owni.fr/2012/11/08/clic-clic-fric/#comments Thu, 08 Nov 2012 10:39:38 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=125462 null

Bonne nouvelle pour les marketeux du web et autres adeptes du SoLoMo en quête du sacro-saint buzz sur le web ! Un nouveau service révolutionnaire vient de sortir, permettant de faire exploser les compteurs de vues des dernières vidéos publiées.

Intitulé Buyral, ce dispositif vend des clics, selon différentes formules : 250 000 à 25 000 000 vues pour des sommes allant de $11,99 à $59,99.

“Marre des vidéos virales qui ne deviennent pas virales ? Avec Buyral, vous aurez des millions de clics à chaque instant !” Le succès d’un Gangnam style, de Call me Maybe ou de Maru à portée de souris ! De quoi ouvrir aussi de nouvelles perspectives à la presse, en quête de modèle stable à l’heure du numérique.

Implantée partout dans le monde, la société multiplie les opportunités d’emploi : de la maternelle aux maisons de retraite, en passant par les laboratoires de recherche et développement, toutes les forces vives sont mobilisées pour cliquer sur le bouton play des vidéos virales de demain.

L’activité du “professional clicking” (“clic professionnel”) est en plein essor et n’est pas près de s’arrêter. “Partout il y a un bouton susceptible de récolter des clics. Ascenseur, distributeurs automatiques, jeux de marteau, explique enthousiaste un porte-parole de Buyral dans une vidéo édifiante :

Cliquer ici pour voir la vidéo.



Bon, vous vous en doutiez, Buyral est évidemment une grosse blague. Mais la vidéo reprend si habilement les codes de communication aujourd’hui répandus – plans léchés, ton mielleux et musique lyrico-cul-cul – qu’elle en devient redoutablement efficace. En guise d’exemple, comparez donc avec la chaise la plus célèbre du monde

Cerise sur le gâteau, viralité sur le plan com’, ce projet sort des cervelles d’une agence de pub, John St., basée au Canada, tout aussi compétente dans le bullshit bingo de la pub en ligne : “social”, “experiential”, “digital”… Qui d’autre pour rendre virale une vidéo proposant de rendre virales des vidéos tout en se moquant de ses propres pratiques ? Inception 2.0.

Contacté par Owni pour en savoir plus sur le projet et en particulier à qui celui-ci peut bien bénéficier, les équipes de Buyral nous ont indiqué être débordées, mais ne manqueront pas de nous répondre “dès qu’une équipe de clics sera disponible”.

Mais il y a fort à parier que cette vidéo ne profite qu’aux auteurs eux-mêmes. La boîte est une habituée de ce genre de coups, qui couplent auto-promo et auto-dérision. Pour mémoire (et pour le plaisir, aussi), le clip promotionnel Catvertising. Bah oui, vous pensiez pas que les vidéos de chats rigolos étaient tournées dans un salon tout de même ?

Cliquer ici pour voir la vidéo.


Photo par Pivic (ccbyncnd)

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Dure loi des cookies http://owni.fr/2012/05/25/aucun-site-ou-presque-ne-respecte-la-loi/ http://owni.fr/2012/05/25/aucun-site-ou-presque-ne-respecte-la-loi/#comments Fri, 25 May 2012 17:06:11 +0000 Florian Cornu http://owni.fr/?p=111269 cookies" dans leurs ordinateurs. Inapplicable, la loi n'est… pas appliquée. Mais fait trembler le marketing et la pub en ligne.]]> You Don't Wanna Steal Wookies Cookies CC by-nc-sa Pedro Vezini

You Don't Wanna Steal Wookies Cookies CC by-nc-sa Pedro Vezini

Ce 26 mai 2012, tous les sites web anglais ne respectant pas la nouvelle loi relative à la défense de la vie privée sur le web seront passibles de poursuites et d’amendes pouvant atteindre la modique somme de 500 000 livres. L’effet d’annonce est renversant, au moins autant que le constat : la loi est inapplicable.

Consentement

Cette nouvelle législation récemment rappelée par la Cnil, issue du Parlement européen, a pour but affiché une harmonisation des règles pour tous les pays de l’UE afin de garantir aux citoyens un meilleur niveau de protection de leurs données personnelles. Si la directive s’applique à tous les pays de l’UE, elle laisse toutefois une marge de manœuvre quant à sa transposition.

Facebook en redemande

Facebook en redemande

Le 21 décembre dernier en Irlande, l'autorité de régulation des télécoms rendait un audit très critique sur Facebook et ...

Selon l’adaptation britannique de la loi, tous les sites web devraient à partir du 26 mai passer en “opt in”. Autrement dit, obtenir le consentement préalable de l’internaute sur les cookies transitant par leur plateforme avant que ces derniers ne puissent recueillir des informations. Le texte vise tous ceux qui servent d’une manière ou d’une autre, à recenser les données personnelles d’un internaute (exceptées les données de navigation).

Les cookies, ce sont ces petits fichiers textes qui aident à stocker et à organiser les informations des internautes. S’ils stockent des données en tous genres (mot de passe, langue choisie, etc.) censées faciliter la navigation, ils permettent également de constituer un profil de l’utilisateur en recensant les sites web qu’il visite, ses goûts, les publicités auxquelles il est le plus sensible, etc. C’est également ce qui permet à tout le secteur de la publicité comportementale en ligne de prospérer en proposant des annonces ciblées.

Le responsable légal du site sera donc obligé par n’importe quel moyen de demander à l’internaute qui arrive sur la page d’accueil s’il accepte ou non les cookies. Il devra également détailler leurs buts précis et la société qui en est à l’origine. Le gros problème, c’est qu’actuellement, aucun navigateur n’est techniquement en mesure de faire la distinction entre les différents types de cookies.

Autrement dit, il ne peut reconnaitre ceux qui servent à rassembler les données personnelles de l’utilisateur pour le compte d’une régie publicitaire de ceux qui servent à retenir vos mots de passe et la résolution de votre vidéo.

Date limite

Il serait bien sûr possible de mettre en place une banderole demandant l’autorisation à l’internaute pour chacun des cookies présent sur un site, mais l’opération risquerait de le perturber, de lui poser des questions qu’il ne comprend pas forcément, et d’aboutir finalement à un refus des cookies par l’utilisateur.

On comprend mieux dès lors, le peu d’engouement des éditeurs de sites à appliquer la loi.
En effet, en dehors de certains sites comme “youronlinechoices” ou de l’option “do not track” sur certains navigateurs qui limitent l’utilisation par un tiers de ses données personnelles, aucun outil technique ne semble actuellement au point pour respecter ces directives.

On ne peut pas reprocher au gouvernement anglais d’avoir précipité la mise en œuvre de la loi. Cette dernière, qui devait normalement s’appliquer en août 2011, avait été repoussée d’un an pour laisser le temps aux différents acteurs de se mettre en conformité.

Malgré ce délai, Christopher Graham, le patron de l’Information Commissioner Office (la Cnil Britannique) a annoncé il y a peu que la majorité des sites publics comme privés ne seront pas à même de respecter la date limite imposée.

Apparemment embarrassé, M. Graham a également précisé que son organisation ne s’engagerait pas dans une croisade contre les sites illégaux au matin du 27, mais prendrait des sanctions au cas par cas si aucun effort allant dans le sens de la loi n’avait été engagé par les responsables légaux. Une déclaration qui se veut rassurante. En même temps, la majorité des sites du gouvernement anglais eux-mêmes ne seront pas en règle à la date prévue…

En France, c’est dans l’ignorance la plus totale que la même loi (en fait deux directives et un règlement) dite “Paquet télécom” a été transposée et mise en application il y a presque un an.

Elle stipule (c’est la Cnil qui le précise) “qu’il faut, tout d’abord, informer la personne de la finalité du cookie (ex : publicité), puis lui demander si elle accepte qu’un cookie soit installé sur son ordinateur en lui précisant qu’elle pourra retirer à tout moment son consentement“. Comme l’explique Sophie Nerbonne, directrice adjointe des affaires juridiques à la Cnil :

La loi s’applique à tous les sites notamment aux réseaux sociaux et aux boutons like et tweet des sites partenaires de Twitter et Facebook (pour diffuser un article une vidéo, etc). Par contre, l’obligation de recueil de consentement ne s’applique pas aux cookies liés aux préférences linguistiques, à la mise en mémoire d’un mot de passe, à la résolution d’une vidéo visionnée online, à un cookie flash ou encore à la mémoire relative à un panier d’achat. En effet, ces informations sont directement liées à une demande de l’utilisateur et ont pour finalité exclusive de faciliter la communication.

L’immense majorité des sites web français sont donc également dans l’illégalité la plus totale et risquent des sanctions financières pouvant aller jusqu’à 300 000 euros.

L’Europe délaisse la neutralité du Net

L’Europe délaisse la neutralité du Net

La commissaire européenne en charge des affaires numériques Neelie Kroes a livré ce matin sa vision d'un Internet ...

À la différence de la Grande-Bretagne, la transposition en droit français implique qu’au lieu d’avoir des cookies en “opt in”, les internautes doivent être informés par les éditeurs de sites “de manière claire et complète de la finalité de toute action tendant à accéder, par voie de transmission électronique, à des informations déjà stockées dans son équipement terminal de communications électroniques, ou à inscrire des informations dans cet équipement”.

Concrètement, les responsables de plateformes françaises ont l’obligation de placer une bannière sur leur page d’accueil renvoyant à une note qui explique en détail à quoi servent précisément les cookies, d’où ils proviennent et comment faire pour les refuser.

La Cnil, dont le rôle est de faire respecter la loi, doit donc chasser tous les sites qui dans un coin n’ont pas affiché un bordereau ou un moyen d’informer les internautes, ce qui est matériellement impossible. En témoigne Sophie Nerbonne :

Nous savons pertinemment que la majorité des sites sont dans l’illégalité et il faudra évidemment des mois pour trouver les solutions et pour les faire rentrer dans la conformité. C’est compliqué car certains d’entre eux ont aujourd’hui tellement de cookies qu’ils ne savent même plus à quoi ils servent. Sur le plan des moyens, la Cnil peut s’auto-saisir et nous avons déjà procédé à des contrôles et à des mises en demeure même si nous nous montrons compréhensifs. En réalité, nous comptons surtout sur la persuasion et la prise de conscience des internautes et des professionnels quant aux enjeux cruciaux du respect de la vie privée sur le web. Nous comptons également sur le développement prochain des moyens techniques permettant de mettre les sites en conformité

En dehors des plaintes de particuliers concernant certains sites, la Cnil est donc obligée de s’attaquer aux plus gros acteurs sans être aucunement en mesure de faire respecter la loi à court ni même à moyen terme pour les millions de site actuellement hors la loi.

Équilibre

Les enjeux économiques de l’application de la loi sont, eux aussi, motif de friction. Si les internautes décidaient massivement de refuser les cookies pour protéger leurs données personnelles, c’est l’ensemble des acteurs de la publicité comportementale et, par extension, les éditeurs de sites web, qui seraient privés d’une partie non négligeable de leurs revenus comme l’explique Fabienne Granowski du Syndicat national de la communication directe à Owni:

Nous voulons trouver l’équilibre entre l’aspect économique et la protection des données personnelles. Nous n’avons vraiment pas intérêt à brader la vie privée parce que nous serions perdants vis à vis de la confiance des internautes. Si l’“opt in” cookie passait en France il nous serait strictement impossible de travailler car nous n’aurions plus de données personnelles.

Dans un communiqué de Presse du 5 Mai 2012, le SNCD annonçait une perte potentielle de 60% des emplois du marketing direct et une augmentation de plus de 16% de demandeurs d’emplois en cas d’application de la loi . Ces chiffres, issus de leur propre étude, sont de nature à justifier les protestations du secteur. Mais Sophie Nerbonne relativise :

Nous comprenons les inquiétudes mais nous avons eu les mêmes protestations des sociétés liées à la communication directe en 2004 lors de la loi sur la confiance en l’économie numérique. A l’époque, les acteurs avaient peur d’un effondrement du système et de pertes d’argent colossales ce qui n’a pas eu lieu. Ethiquement, il n’est pas possible de continuer à faire prospérer un système économique sur de la récolte de données personnelles alors que l’internaute n’est pas au courant de ce que l’on en fait précisément. Il est nécessaire de développer des techniques efficaces permettant aux internautes d’être conscients de ce qu’on fait de ses informations sans que cela pèse pour autant sur l’économie de la publicité ciblée.

Par ailleurs, le développement de logiciels et d’interfaces permettant de gérer les cookies et de trouver des solutions peut représenter une manne financière non négligeable


Images : You Don’t Wanna Steal Wookies Cookies CC by-nc-sa Pedro Vezini, et you ate my heart CC by-nc-nd Adam Foster | Codefor

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Sarkozy détourné de son image http://owni.fr/2012/02/19/sarkozy-detourne-de-son-image/ http://owni.fr/2012/02/19/sarkozy-detourne-de-son-image/#comments Sat, 18 Feb 2012 23:25:34 +0000 André Gunthert http://owni.fr/?p=99004

Selon la formule célèbre du livre Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte, de Karl Marx, les grands événements historiques se répètent, “la première fois comme tragédie, la seconde fois comme farce.” Cette fois, c’est sûr, on est dans la farce.

Telle était du moins l’impression que produisait l’accueil de l’annonce de la candidature de Nicolas Sarkozy aux prochaines présidentielles sur les réseaux sociaux. Pendant qu’une grande partie de la presse s’efforçait de nous convaincre que les choses sérieuses allaient enfin commencer, les outils de l’appropriation s’emparaient du slogan et de l’affiche de campagne pour une série de détournements dévastateurs.

Un slogan giscardien, une affiche mitterrandienne: les communicants sarkozystes ne brillent pas par leur imagination. La seule tentative qui sortait de la routine était celle de décliner la métaphore du capitaine courage, utilisée par le candidat lors de son allocution télévisée. Mais l’option du fond marin pour habiller l’image était un choix risqué, véritable appel du pied aux blagues et au second degré après l’échouage du Costa Concordia ou la proximité de la sortie du film La mer à boire.

Ça n’a pas raté. Avec une réactivité significative, les premiers détournements mettaient en scène Sarkozy en capitaine naufrageur (voir ci-dessus), suivis de près par le baigneur naturiste du catalogue La Redoute.

A l’époque mitterrandienne, la présence d’un fond uni ou d’un emplacement vide était un choix visuel sans risque particulier. A l’ère du mème et de la retouche, c’est une provocation à la satire. La simplicité graphique de l’affiche La France forte, composée de 3 éléments nettement distincts – le personnage, le slogan et le fond – se prête admirablement à l’appropriation. Constatant le succès du mème, le mouvement des Jeunes socialistes proposait dès le milieu de la matinée un générateur automatique permettant de modifier le slogan ou d’appliquer diverses variations à l’image.

Outre “la France morte”, on a pu noter le succès récurrent de l’adaptation culinaire du slogan, remixé en “Francfort”, allusion à l’empreinte du modèle germanique qui hante la candidature Sarkozy (voir ci-dessus).

Que le net s’empare d’un contenu politique et le détourne, quoi de plus normal ? Mais on n’a pas constaté pareille explosion satirique à l’endroit de François Hollande, dont la campagne, si elle peine à soulever l’enthousiasme, ne provoque pas non plus d’opposition massive. La rage mordante de la caricature s’adresse bien au président sortant, dont le moindre discours paraît définitivement inaudible, menacé par l’inversion et la raillerie. Révélateur de l’exaspération qu’il suscite, le sarcasme le plus cruel a consisté à mimer l’effacement du candidat sur sa propre affiche, jusqu’à la disparition (voir plus haut).

L’écart est frappant entre cet accueil et le sérieux avec lequel la plupart des grands médias continuent de considérer une campagne menacée par le naufrage avant même d’avoir commencé. Qui, à part Alain Duhamel, croit encore que Sarkozy est capable de rééditer Marengo et de l’emporter in extremis par un retournement inouï ? Mais le storytelling d’un combat gagné d’avance ne fait pas les affaires de la presse, qui attend depuis des mois le pain béni de la présidentielle, et qui fera tout pour donner à des chamailleries de cour de récréation les couleurs d’affrontements homériques.

Pendant ce temps, la France ricane, et s’amuse plus sur Facebook que dans les mornes sujets du JT. Une divergence de perception qui rappelle le traitement de l’affaire DSK – et n’annonce rien de bon pour la suite…


Cet article, que nous rééditons ici, a été initialement publié sur Culture Visuelle

Crédits Photos CC FlickR André Gunthert

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Le “mème” Sarkozy sur Facebook http://owni.fr/2012/02/10/le-meme-president-sarkozy-timeline-facebook/ http://owni.fr/2012/02/10/le-meme-president-sarkozy-timeline-facebook/#comments Fri, 10 Feb 2012 19:11:03 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=98056

Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy a fait un cadeau de choix aux internaut(r)es : une magnifique page Facebook, à son nom, construite autour de la “timeline”, une frise chronologique, l’une des dernières fonctionnalités du réseau social. Grâce à cette échelle du temps magique, les communicants du presque-mais-en-fait-pas-tout-à-fait candidat à sa réélection ont pu retracer les moments marquants de son histoire politique. Voire son histoire tout court : le profil débute à la naissance de Nicolas Sarkozy, le 28 janvier 1955. Et remonte jusqu’à l’une de ses dernières sorties, le 9 février dernier, sur le site de la centrale de Fessenheim. Avec au milieu, des coucous, des risettes, des envolées lyriques, la galette des rois géante de l’Élysée, encore des éclats de rire, mais aussi du sérieux, du grave, la naissance du “premier petit-fils Solal” entre la mort de Philippe Séguin et une visite à la Réunion ; bref, la vie, la mort, du palpable, de la chair de Président, merde ! Le tout enveloppé d’un “je” tout à propos. Les communicants appellent ça du ”storytelling”. Un procédé qu’ils affectent particulièrement, par exemple, au hasard, pouf! pouf! au moment de l’élection présidentielle.

L’intérêt du tire-larmes storytellé de Sarko est au-delà de cette énième manœuvre de com’. Ou de sa présence renforcée sur le réseau bleu (tous les candidats y sont). Il réside dans ce qui est dit -ou pas- et ce qui montré, surtout. Si la date de naissance des quatre enfants de Nicolas Sarkozy a méticuleusement trouvé sa place dans son histoire sauce Facebook, ses mariages successifs eux, n’ont pas voix au chapitre. Carla est pourtant bien présente dès 2008, auprès de son président de mari, qu’elle a épousé le 2 février de la même année. Quand le chef de l’État semble vouloir jouer sa réélection sur “ses valeurs pour la France”, les enfants sont manifestement plus porteurs que les multiples épouses.

Plus cocasse encore que la vie privée tronquée, la vie politique réécrite. Comparons -rapidement- le parcours de Nicolas Sarkozy selon Wikipedia et ce même parcours selon Facebook. L’encyclopédie collaborative indique par exemple “1993 – 1997 : premières responsabilités gouvernementales et « traversée du désert »”. L’encart revient sur l’année 1995 et le soutien de l’actuel président à Édouard Balladur, alors candidat à la fonction suprême, et l’échec qui s’en est suivi. Sur Facebook, surprise : la période 94-97 est littéralement vide, comme le souligne le chroniqueur Guy Birenbaum. Ou presque : notons tout de même l’éloquente photo de la famille Balladur-Léotard-Veil-Sarkozy, qui pendouille dans un télésiège du côté de Chamonix. Priceless. C’est peu dire que l’exercice est limité. Et cadré : de la même façon, si les fameux pouces en l’air (“j’aime”) sont autorisés, les commentaires, eux, sont bannis.

Difficile d’y voir cette “une utilisation moderne et innovante des nouvelles fonctionnalités de Facebook au service de la transparence et du storytelling digital”, décrite avec emphase par le blogueur, chroniqueur audiovisuel et directeur général d’une agence de communication Emery Doligé. Qui y voit aussi “de l’épaisseur [...] et de la scarification”. On a eu beau chercher, on n’a pas trouvé de photo de notre Président adolescent emokid s’ouvrant les veines pour appeler au secours.

Mais le plus beau cadeau de Sarko à vous, peuples étranges des interouèbes, automobilistes des autoroutes de l’information, n’est pas tant cet aveu d’inconformité aux pratiques d’Internet, qui cherchera toujours la petite bête. La vraie bénédiction, ce sont ces photos. Puits à mèmes sans fin. Corne d’abondance du LOL.

Certains se sont déjà prêtés au jeu et, comme eux, nous n’avons pas pu résister à apporter notre petite touche au mouvement. 4 THE LULZ /-)

On peut édulcorer un poil la timeline :

Pimenter cet instant volé sur la plage avec la chancelière allemande Angela Merkel, dont Nicolas Sarkozy se sent si proche :

Ou bien encore ce vibrant moment alsacien changé en facebomb régionaliste :

Vous aussi, aidez-nous à enrichir le Sarko-mème, véritable patrimoine 2.0 !


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Les data en forme http://owni.fr/2012/01/02/les-data-en-forme-noel-guardian-wsj-wtf/ http://owni.fr/2012/01/02/les-data-en-forme-noel-guardian-wsj-wtf/#comments Mon, 02 Jan 2012 16:58:09 +0000 Paule d'Atha http://owni.fr/?p=92073 Pour une transition en douceur, commençons ce premier Data en forme de l’année en mode data-lol avec ce diagramme de Venn qui sent encore le sapin vert et le grand bonhomme rouge.

Cette dataviz est tirée d’une petite compilation de visualisations décalées autour de Noël. En cette période post-nativité, ça apaise les indigestions.

Dans le rétro

Et cela me permet d’enchaîner allègrement sur la thématique des best of. Chaque fin d’année on y a droit, donc pour ce début d’année nous vous proposons un rapide best of des best of sous l’angle data.

Nathan Yau, l’homme derrière Flowing Data, propose une très belle sélection des projets de datavisualisations qui ont marqué pour lui l’année 2011. On y recroise avec plaisir des viusalisations qui nous avaient également marquées et on en découvre d’autres avec tout autant d’appétit.

Allez également fouiller les commentaires de cet article, quelques autres bonnes références pourraient y apparaître.

Pour changer, le Guardian joue les cumulars avec deux entrées dans cette catégorie best of. Les équipes londonniennes ont sorti un article racontant l’année 2011 par les données : quelles ont été les plus marquantes, quelles histoires ont-elle racontées, quels chiffres ont tracé la courbe de cette année écoulée ? En somme douze mois dans la tête d’un datajournaliste.

Le département de recherche du Guardian a également produit une web-application bien pensée pour visualiser, jour par jour, les 365 événements qui ont marqué l’année 2011. L’interface est simple et ergonomique avec une navigation secondaire mettant en avant les grandes “affaires” de 2011. Vous pouvez même constituer votre top 10 des informations qui vous ont le plus marqué et comparer ce classement avec le choix des lecteurs du Guardian.

Pour clore le volet Guardian, leur e-book Facts are sacred ressemble à un best of à lui tout seul. Ce court résumé parle de lui-même :

Facts are sacred raconte comment nous travaillons avec les données au Guardian et comment les données changent le monde qui nous entoure.

Rails, trafic et data

Restons encore quelques instants à Londres et remontons dans les années 1920. À cette époque, il y avait déjà des pontes de la dataviz qui sévissaient outre-Manche et ils s’amusaient follement sur des campagnes d’affichage pour le métro londonien.

90 ans plus tard, outre-Atlantique. Le Wall Street Jounal a construit une impressionnante web-application autour des habitudes des usagers du métro new-yorkais. Card Usage analyse les données collectées à partir des cartes d’abonnements. Quartier par quartier vous pouvez visualiser quels types d’abonnements les usagers utilisent le plus et comment ces répartitions ont évoluées depuis l’augmentation des tarifs en décembre 2010. Allô, la RATP ? Tu nous prêtes tes données ?

Côté route, depuis les années 20 et les dataviz du métro londonnien, la circulation s’est légèrement densifiée. Quand le moteur de recherche russe Yandex lance un service de visualisation du trafic en Turquie, il récolte suffisamment de données GPS pour s’amuser à représenter le trafic d’Istanbul.

Voici la journée du 3 novembre 2011 avec en haut à droite le degré d’encombrement des principaux axes de la capitale turque. Le rendu est assez hypnotique.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Flots, ondes et indices

Rassurez-vous, tous les flux ne sont pas aussi nerveux, une dataviz ça peut aussi être zen. Prenons, par exemple, la relation entre les lieux où tombe l’eau aux États-Unis et ceux où elle est consommée. Ça nous donne Drawing water, un projet qui piste le trajet des eaux de pluie. Les visualisations produites sont assez impressionnantes tout comme l’installation interactive exposée à l’université de Los Angeles (UCLA) où le visiteur peut modifier les représentations à l’aide d’une tablette.

Une fois n’est pas coutume, la visualisation suivante présente des données qui ne sont pas à proprement parler chiffrées mais reste bien des données : du son et plus précisément l’ensemble des instruments qui composent un orchestre.

Dans un but promotionnel, Philips a développé cette web-application L’obsession du son où le visiteur est littéralement immergé au coeur de la formation. Vous pouvez, à n’importe quel moment, choisir l’un des musiciens et focaliser votre écoute sur sa partition avec en plus des données associées à l’instrumentiste.

Restons en musique et terminons ce premier épisode des Data en forme saison 2012 comme nous l’avons commencé : avec du WTF. Avez-vous déjà fredonné, le matin au réveil, le chant du CAC40 ? Non ? Peut-être alors l’entraînante mélodie du Nasdaq sous une douche bien chaude ? Non plus ? Bon, alors c’est cadeau : voici le chant du Dow Jones, The Dow Piano.

À la semaine prochaine et d’ici là, n’oubliez pas : “In cafein we trust”.

Retrouvez tous les épisodes des Data en forme !

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[Infographie] Tu te fais des films! http://owni.fr/2011/08/12/film-canal-plus-action-porno-sexe-animation-horreur/ http://owni.fr/2011/08/12/film-canal-plus-action-porno-sexe-animation-horreur/#comments Fri, 12 Aug 2011 18:26:33 +0000 la redaction http://owni.fr/?p=76087 Au mois d’avril dernier, Canal Plus, sous sa casquette de studio cinéma,  livrait ses meilleures recettes pour réaliser des films… et ce quelque soit leur orientation. Animation, action, horreur et même porno, le groupe, pas farouche pour un sou, vous montre le chemin à suivre pour que vos meilleures productions atterrissent dans les salles obscures ! Mais attention, la route est semée d’embuches…

Des infographies drôles et pas idiotes réalisées par Les Graphiquants,  qu’OWNI a enrichi pour vous avec des bandes annonces, des making-of… et quelques bêtises. Une pépite retrouvée par Korben.


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Joyeux anniversaire l’interouèèèbe ! http://owni.fr/2011/08/10/joyeux-anniversaire-linteroueeebe/ http://owni.fr/2011/08/10/joyeux-anniversaire-linteroueeebe/#comments Wed, 10 Aug 2011 06:25:20 +0000 la redaction http://owni.fr/?p=75786 Cher interouèbe,

Assumant le pas de côté et la périodicité de magazine, OWNI te fête un TRÈS JOYEUX ANNIVERSAIRE. Avec quatre jours de retard. Mais quand même! Sache que ce délai n’enlève rien à la grande affection que nous te portons. Si. Si.

Bon, d’accord, on a oublié. Pardon.

Mais tu n’es pas sans savoir que ta date de naissance est sujette à caution. Des doutes sur le père demeurent, ainsi que le rappelait Cyroul en janvier dernier. De ce fait, c’est un peu ton anniversaire tous les jours. D’ailleurs, le peuple qui est le tien te le rappelle sans arrêt, en te célébrant quotidiennement, à sa façon.

OWNI se joint à l’élan commun en t’offrant très solennellement ce magnifique gâteau d’anniversaire, agrémenté comme il se doit de bougies, de crème, de vidéos, d’articles et de photos.

Ta généalogie, tes protégés comme tes ennemis: on s’est permis d’en mettre quelques bouts, histoire de se rappeler les bons moments passés ensemble.

On dit que 20 ans, c’est le plus bel âge. C’est aussi celui des bêtises. On peut dire que tu cumules déjà un peu les deux. Et on te fait confiance pour continuer à grandir, à t’épanouir, à être cette chose merveilleuse que tu es déjà.

Avec tout notre amour,

Survolez la photo pour faire apparaître les liens.


Illustration CC FlickR: thewazir

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Christian Vanneste a du mal avec la loi informatique et libertés http://owni.fr/2011/07/18/christian-vanneste-a-du-mal-avec-la-loi-informatique-et-libertes/ http://owni.fr/2011/07/18/christian-vanneste-a-du-mal-avec-la-loi-informatique-et-libertes/#comments Mon, 18 Jul 2011 06:13:14 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=73121 Christian Vanneste, député UMP du Nord, a déposé récemment une proposition de loi pour circonscrire l’accès des mineurs aux sites pornographiques. En appui, il a mis en ligne une pétition, via l’association Famille et liberté, qu’il préside. 

En accueil de la pétition, il est précisé :

Pourtant, que voit-on trainer ?

Comme on peut le constater en se référant au numéro de la colonne de gauche, ce petit problème ne semble pas préoccuper ceux qui gèrent la pétition puisque ce petit fail remonte au début (signataire n°59). Peut-être ces pétitionnaires auraient-ils dû écrire de façon claire :

Contactée, la CNIL a bien confirmé qu’il y avait bien un problème :

« Nous avons relevé 3 cas de diffusion de l’adresse mail des pétitionnaires sur près de 800 personnes concernées. Cette diffusion est réalisée par le biais de la zone commentaires et non dans le champ d’identification du pétitionnaire :

Pour autant, le site ne précise pas que cette zone commentaire et/ou l’adresse mail des personnes seront diffusées (« Seuls vos noms, prénoms, ville, métier seront visibles dans la liste »). Le responsable de traitement est en faute sur ce point (problème de sécurité des données, art.34 de notre loi et 226-17 du Code pénal). »

En outre, elle souligne un autre point que nous n’avions pas vu :

« Par ailleurs, sur l’aspect déclaratif, le site vise la dispense de déclaration n°7. Ni la dispense n°7 (qui concerne les traitements constitués à des fins d’information ou de communication externe – NDLR) ni la n°8 (qui porte sur les traitements mis en œuvre par des organismes à but non lucratif – NDLR) ne sont applicables à une pétition.

Dans la mesure où les données recueillies ne sont pas sensibles au sens des articles 8 et 9 de notre loi, une déclaration normale aurait dû être réalisée préalablement à la mise en ligne du formulaire de collecte et à la diffusion de la liste des pétitionnaires. »

On notera aussi au passage que le lien en orange vers la Cnil ne marche pas et que le dispositif anti-spam n’est pas très solide.

Contactée par mail la semaine dernière, l’association a répondu ce lundi 18 juillet en la personne d’un nommé Philippe Gorre :

« merci pour votre message. Je rentre d’une semaine sans ordinateur. J’interroge notre prestataire et je vous tiens au courant. »

Image CC Flickr PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales Chuckumentary

MAJ le 18 juillet à 20 h 55 suite à la réponse de l’association.

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Ecrans de fffuuu mée http://owni.fr/2011/07/01/ecrans-de-fffu-mee/ http://owni.fr/2011/07/01/ecrans-de-fffu-mee/#comments Fri, 01 Jul 2011 14:04:20 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=72450 Ce matin, j’ai la gueule de bois. Écrans est mort. Ou presque : son enterrement a été célébré la veille, au sein des locaux de Libération, au niveau de la plate-forme “Culture”. Après quatre ans d’existence, le site “de tous les écrans” du journal, sur lequel dépiotage d’Internet, LOLeries en tous genres et bêtes à poils cohabitent en toute sérénité, voit son équipe non renouvelée. Une situation inacceptable pour son chef de toujours, Erwan Cario, qui jette l’éponge.

Alexandre Hervaud, twitto jovial dont le nombre de CDD rue Béranger n’a d’égal que le volume de films nazes visionnés et commentés (j’exagère à peine), s’est vu refuser la signature d’un contrat en CDI. Camille Gévaudan, wikipedienne experte et caution Pokemon-kawaï du site, est obligée, c’est la loi, d’entamer une période de carence à la suite de son CDD. La direction lui garantit un retour en octobre. En CDD, encore. Jusqu’à ce que la situation se répète, qu’un CDI lui soit refusé et qu’elle aussi se voit obligée de partir. Stagiaires, CDD : il n’a jamais été question que de précarité à Écrans. Comment construire dans ces conditions ?

Libération prend l’engagement d’assurer la continuité éditoriale d’ecrans.fr. Ce site n’est pas menacé d’extinction.

C’est en ces termes, adressés à tout Libération, que Nicolas Demorand a répondu aux inquiétudes de l’équipe, affirmant que deux nouveaux CDD pourraient être créés, pour “assurer, dit-il, la continuité éditoriale du site ecrans.fr.”

Proposition à laquelle Erwan Cario a opposé une fin de non-recevoir (l’intégralité du texte ci-dessus) :

Tu as envoyé un mail à toute l’équipe concernant l’avenir d’Ecrans.fr sans même avoir évoqué avec moi depuis l’AG les sujets que tu abordes. Et ce texte, qui me pousse à cette clarification publique, ne contient aucune information nouvelle et ne fait que confirmer une décision prise depuis longtemps: continuer avec une équipe constituée d’un CDI et de deux CDD renouvelés jusqu’à épuisement. [...] Depuis un mois et demi, à chaque occasion, je t’ai expliqué que je renoncerai à l’aventure passionnante qu’est Ecrans.fr si Libération se refuse à pérenniser mon équipe. A chaque fois, tu as acquiescé. Ce n’est ni un caprice, ni un ultimatum, mais le simple constat que Libération ne veut pas ou ne peut pas se donner les moyens d’une présence éditoriale forte sur les sujets importants que sont les nouvelles cultures numériques et l’impact d’Internet sur toutes les strates de la société. Aujourd’hui, je ne peux plus assumer la responsabilité d’un projet auquel je ne crois plus dans les conditions qui me sont proposées. [...]
Erwan Cario, ex-responsable d’Ecrans.fr

La précarité de la situation d’Écrans, ainsi que d’autres changements souhaités au sein du journal, ont conduit Libération à organiser une motion de défiance à l’encontre de son tout nouveau directeur de la publication, Nicolas Demorand. 80% de participation, plus de 78% de votes favorables. “Un coup de batte de base-ball dans la nuque”. Pas suffisant néanmoins pour changer le cours des choses et assurer la pérennité d’Écrans. D’autant qu’un projet comme Next, véritable appeau à annonceurs, se développe depuis un moment.

Période trouble

J’ai été formée à Écrans. J’y ai entamé la construction d’une compétence, l’enrichissement d’un intérêt pour Internet et ses ramifications fascinantes. J’ai pu y écrire tant des analyses de sujets complexes comme la neutralité des réseaux que des revues de choses drôles, belles, absurdes, vues sur le “trois w”. Et l’une comme l’autre recevaient la même considération, aucun sujet n’était plus “noble”. Chaque progéniture d’Internet méritait un même œil attentif et bienveillant.

Avec la fin d’Écrans, les difficultés rencontrées par 01.Net ou même la période trouble que nous avons traversé ici, à OWNI, je m’interroge sur l’avenir du journalisme sur et à propos d’Internet.

Lors de mes premiers stages, en 2007, j’avais été surprise par la violence des journalistes à l’égard du support. “Je ne veux pas être un presse-bouton” était la rengaine classique dans les rédactions investies par le web. Ne parlons pas du traitement réservé à la thématique, reléguée au rayon “Insolites”, ou “buzz”. Le journalisme web amoureux du web était le renégat du milieu. Incarnant la menace que faisait peser l’inévitable “convergence numérique” sur les titres traditionnels, il traitait, dans un même temps, de sujets échappant complètement aux journalistes. Menace double. Résistances.

Dans une étude intitulée Le journalisme après Internet, le sociologue Yannick Estienne écrivait :

La question de l’identité des journalistes en ligne reste ouverte, et l’accès à la reconnaissance reste une gageure.

Achevée en 2006, son enquête et les conclusions qu’il en tire restent valables à ce jour.

En 2011, les partis s’emparent de la question du numérique. Il est dit qu’Internet est porteur de 25% de la croissance sur les trois prochaines années. Edwy Plenel frémit en parlant de WikiLeaks. Rue89 obtient 200.000 euros de Claude Perdriel, dont la majorité ira à la formation d’un pôle data, en se posant comme le “laboratoire” du Nouvel Observateur.  Acculturation.

Pourtant, la considération de notre métier et de ses valeurs semble ne pas avoir évoluée. La reconnaissance de cette particule “web”, encore encombrante pour beaucoup, est restée au point mort. Les mêmes acteurs continuent à battre les cartes, ici ou sur le papier; continuent à transposer les vieilles recettes sur un support aux possibilités d’innovation pourtant infinies.

fuuuuuuuuu

Nous sommes webjournalistes et nous en sommes fiers. Nous croyons en la métarédaction et en l’horizontalité, à la convergence des énergies et des expertises. Nous croyons en la possibilité d’un autre journalisme. En ce sens, nous en rognons la rente, nous lui faisons violence. Nous sommes des petits cons. Et fiers de l’être.

Et vous qu’est-ce qu’on vous a dit, petits cons des interouèbes ?

Sabine : quelques semaines après ma première prise de poste, comme “journaliste webmaster” (“hey, Sabine tu me répares l’imprimante ?” “Non, j’ai fait des études de lettres.”), un baron de la rédac’ a dit, bien fort, devant tout le monde, “le web, j’en ai rien à branler”. Aujourd’hui retraité, il a un profil Facebook, un iPhone, un blog – il m’a d’ailleurs demandé des conseils à ce sujet, que je lui ai volontiers donnés -, et il twitte. Mais je ne le followe pas.

Images CC Flickr PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales EPIC FU

Pour ceux qui n’ont pas compris le titre, des indices ici.

Téléchargez la belle une de Elsa Secco

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