Concentration majors/ indépendants : rock the music industry !

Le 18 septembre 2010

L'industrie musicale vu par le prisme des concentrations, dé-concentrations et re-concentrations qui ont émaillé son histoire, avec comme le point central... le rock'n'roll !

Hugo Amsellem revient sur l’impressionnant mouvement de concentration, déconcentration et re-concentration qu’a connu l’industrie musicale à partir des années 50, et qui a pour origine une forte secousse au sein du champ institutionnel : le rock’n'roll !

La crise… de 1929

La crise de 1929 accentuée par l’émergence de grandes chaines de radio a fait chuter les ventes de disques de 150 millions à 25 millions en 1935 aux Etats-Unis. La radio est premièrement tenue responsable de cette crise, car elle offre gratuitement l’écoute de musique. Pour faire face à ces revenus en chute, l’industrie musicale se restructure et ce concentre. Ainsi à la fin des années 1930, le marché mondial est dominé par 3 entreprises : Victor, Columbia, EMI et Decca fondé en 1934. La stratégie est dès lors différente puisque les maisons de disque impliquent désormais les grandes chaines de radios dans la promotion des artistes.

Decca fut la première entreprise à se consacrer uniquement à la production, à la commercialisation, et la promotion de ses artistes. Ainsi cette firme créée elle même le fameux « star-system » en ne concentrant ses efforts que sur quelques artistes, répondant désormais an nom de « stars ». Les nombreux « hit parade » rassemblent chaque samedi soir des milliers d’américains derrières leurs postes de radios pour connaître l’artiste le plus acheté de la semaine.

50s – 70s : it’s (not) only rock’n'roll

En 1954, avec l’explosion de la culture « Rock and Roll », les majors ne sont plus qu’à l’origine de 34% des disques figurant dans le top 100. En effet, le rock est contestataire, et donc indépendant. Les labels indépendants deviennent donc très puissants sur ces segments anciennement de niche. L’industrie musicale assiste donc pendant cette période la a un phénomène de déconcentration du marché, avec de nouveaux entrants qui viennent prendre des parts de marché importantes aux acteurs principaux du secteur.

Suite à cette révolution « Rock & Roll » les majors vont adopter une toute nouvelle stratégie. Avant cela, les maisons de disques produisaient un nombre relativement peu élevé d’artistes, mais avec un matraquage médiatique tel que ces artistes devenaient des stars avec les retombées financières attendues. Mais face à la menace de nouveaux entrants les majors adoptent une nouvelle stratégie qui part d’une remise en cause de leur cœur de métier. D’une part car les indépendants déplacent leur centre de gravité de la commercialisation des disques, à la découverte de nouveaux talents. Et ce cœur de métier n’est pas imitable pour les majors, ce qui confère aux indépendants un avantage concurrentiel certain.

La stratégie introduite par Warner au cours des années 1970 fut de construire « des organisations multidivisionnelles par lesquelles les firmes deviennent des fédérations de labels ». Ainsi la division musique de Warner-Bros rachète successivement trois des labels indépendants les plus innovants : Atlantic, Electra et Asylum. La découverte de talents est donc externalisé puisque les labels achetés gardent une autonomie stratégique mais sont toujours rattachés à la maison mère.

De part cette nouvelle stratégie adoptée par la suite par tous les acteurs de l’industrie, les majors combattent l’incertitude du marché. Avec des coûts de productions et surtout de promotion importants, les majors multiplient les sorties pour espérer rentabiliser les productions dont 1/10ème atteint l’équilibre financier. Ainsi on assiste à une concentration verticale de l’industrie qui a pour but ultime de réduire les coût fixes et créer des économies d’échelles.

Pendant cette longue période qui s’étale de l’invention du phonographe à aujourd’hui, on distingue principalement 6 régimes de concurrence :

- La concurrence sur les appareils d’écoute notamment entre Berliner et Edison

- La concurrence se déplace alors sur la qualité des systèmes d’écoute

- La concurrence va alors s’installer sur les « stars » dans le modèle du « star system »

- Puis avec l’émergence de nouveaux courants musicaux, la concurrence se déplace vers la capacité des maisons de disques à produire des musiques alternatives, et donc d’anticiper, de découvrir, et de profiter des nouvelles tendances.

- Après 1960 les majors vont réorganiser le système en firmes multidivisionnelles et la concurrence s’effectue sur la stratégie de fusion et d’acquisition des labels.

- Le dernier régime de concurrence va se déplacer vers la gestion du catalogue, en monétisant le « back catalogue » avec l’apparition dans chaque majors d’une division « publishing ».

Et aujourd’hui ?

En 2009, nous nous retrouvons en quelques sorte dans la même configuration qu’au début des années 50. 4 Majors se partagent 80% du marché de la musique enregistrée (en valeur) et trustent presque toutes les places des tops. Et encore une fois les nouveaux comportements consommateurs remettent en cause cette domination et intrinsèquement le modèle même des majors. Quel nouveau modèle va émerger de cette révolution? Le pouvoir ne semble cette fois-ci pas être transféré vers les indépendants, ou en tout cas pas pour l’instant.

Article initialement publié sur industriemusicale.com

Crédits photos CC FlickR Artnow314; timpearcelosgatos; ikaink

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